
Rémy Durieux est un jeune Français qui s’est donné les moyens de réussir en Australie. Rien ne prédestinait ce fils de fonctionnaires à devenir agent immobilier au bout du monde. Pourtant, en 2020, il a ouvert son agence immobilière à Carina, au sud de Brisbane. Devenu citoyen australien il y a quelques années, l’homme de 29 ans a su faire preuve d’une détermination saisissante. Modeste mais ambitieux, il a gravi les échelons un à un avec une seule devise : « Have a go! ». Pour Rendez-Vous Australie, il nous livre son parcours.
Les réseaux sociaux, qu’on les aime ou les haïsse, font parfois bien les choses. Depuis quelques temps, je cherche à acheter un appartement. Mes cookies me trahissant, mon « feed facebookien » regorge de publications vantant les qualités démesurément exceptionnelles d’une multitude d’agents immobiliers auxquels je ne prête guère attention. Or il y a quelques temps, parmi toutes ces publicités, un nom attise ma curiosité : Rémy Durieux. Le patronyme est familier. L’individu serait-il français ? Je pousse mes recherches, regarde les vidéos qu’il met en ligne et ne reconnaît pas d’accent francophone. Peut-être est-il né en Australie de parents français ? J’approfondis et je m’aperçois qu’il maîtrise parfaitement la langue de Molière. Ni une, ni deux, je le contacte. Je suis intriguée par le personnage.
Deux jours plus tard, nous nous donnons rendez-vous dans un café au sud de Brisbane. J’espère vraiment que je ne perds pas mon temps avec une personnalité à l’ego surdimensionné dont souffrent tellement la plupart de ses confrères. Long black et flat white en main, nous nous asseyons et faisons connaissance. Derrière ses traits juvéniles, j’observe un jeune homme calme et réfléchi, loin des clichés. Je le questionne et chacune de ses réponses appellent davantage de questions. Son parcours me fascine !
Un enfant du Fenua
Né à Marseille en 1991, ses parents sont très vite mutés en Polynésie française. Et c’est ainsi que le jeune homme va passer son enfance et son adolescence à Teahupoo, sur l’île de Tahiti. Comme beaucoup de jeunes qui vivent sur l’archipel polynésien, il enchaîne les séjours linguistiques en Nouvelle-Zélande et en Australie. Chaque année, ses parents l’envoient à Gold Coast. Rémy tombe amoureux de ce grand pays et s’y fait de nombreux amis au fil de ses séjours.

Le bac en poche, l’adolescent quitte à contre cœur le Fenua avec sa famille. Il doit poursuivre ses études en métropole. Il décroche son diplôme universitaire de technologie en mesures physiques. Mais ce retour en France se fait difficilement. Rémy a du mal à s’adapter à son pays natal qu’il connaît peu. La douceur du Pacifique lui manque. Les mentalités négatives, les manifestations à outrance, l’insécurité ont raison de lui. « Durant mes études, on m’a volé l’intégralité de mes pneus trois fois. J’étudiais et travaillais dur à côté pour financer mon indépendance. Cela peut paraître anecdotique mais c’est tellement révélateur d’une société à laquelle je ne pouvais pas m’adapter. »
L’Australie, son Eldorado
En 2010, le jeune homme est catégorique, il refuse de rester en France. Il décide ainsi de poursuivre ses études en Australie. Une aventure onéreuse qui n’effraie pourtant pas Rémy. Il n’est pas né avec une cuillère en argent dans la bouche mais il est débrouillard. Aussitôt, il obtient un prêt bancaire auprès d’une banque française et décolle pour Wollongong en Nouvelle-Galles du Sud. Il s’inscrit à l’université et obtient son Bachelor of Material Engineering. Dès lors, il commence à éplucher les offres d’emploi dans son domaine, mais les perspectives de carrière ne sont pas réjouissantes. Travailler seul en laboratoire ne séduit pas du tout le Français dont la nature est profondément sociable.

Il rejoint dans la foulée son meilleur ami sur la Gold Coast, qu’il avait connu lors d’un séjour linguistique plus tôt dans sa jeunesse. Rémy trouve vite un emploi dans la restauration en tant que serveur. Il est sérieux et appliqué. On le remarque. Fort de son expérience, il se fait embaucher au Palazzo Versace à Main Beach. Grand amateur de vin, il partage sa passion des grands crus avec la clientèle de l’hôtel et est rapidement promu au rang de sommelier. « Si tu peux vendre des maisons comme tu sais vendre des bouteilles de vin, tu devrais songer à devenir agent immobilier », lui glisse un cador de l’immobilier qu’il vient de servir. La remarque ne tombe pas dans l’oreille d’un sourd…
Si tu peux vendre des maisons comme tu sais vendre des bouteilles de vin, tu devrais songer à devenir agent immobilier.
Mark McGill
En parallèle, Rémy rencontre Althea, une jeune femme australo-singapourienne qui deviendra son épouse. En 2014, les amoureux partent travailler sur Hamilton Island, toujours dans l’hôtellerie et la restauration. Les mois s’écoulent paisiblement sur l’île et le Français gagne bien sa vie. « C’était idéal pour moi ! Je vivais sur une île paradisiaque qui me rappelait la Polynésie ; j’avais un bateau ; j’exerçais un métier qui me passionnait. J’ai eu l’occasion de servir Johnny Depp, Taylor Swift ou encore Gina Rinehart », confie-t-il. Pour sa jeune compagne, l’isolement est plus difficile à supporter. Un an plus tard, le couple part s’installer à Brisbane. Une ville qui le surprendra agréablement. « J’adore Brisbane. Une ville dynamique à taille humaine, et sûre. »

Il vend 36 maisons en douze mois
Rémy retrouve un emploi très rapidement dans un établissement hôtelier très coté. Cependant le secteur immobilier lui fait du pied. À 25 ans, il franchit la porte d’une agence immobilière. Il n’est pas attendu mais cela ne le perturbe pas. « Si tu vends une maison ce mois-ci, on t’embauche ! », lui affirment ses futurs patrons. Rémy n’est pas un rigolo et il vend trois maisons durant la première semaine. Le jeune Français apprend le métier au bas de l’échelle, commet des erreurs mais prend ses responsabilités. Comme à son habitude, il est sérieux et passionné. Il vendra 36 propriétés en douze mois.
Il quitte cette première agence, se fait embaucher au nord de la ville par des concurrents. Toutefois, les conditions de travail ne sont pas viables. « Lorsque vous travaillez en agence, il faut quand même payer soi-même son matériel promotionnel : cartes de visite, brochures, annonces publicitaires, etc. Je déboursais plus de 700 dollars par semaine. C’était un gouffre financier », admet Rémy. « Au bout d’un an, j’ai quitté cette boîte et j’ai été embauché par une agence-boutique à Newstead, Graczyk Thompson. Cela a fait décoller ma carrière. J’ai énormément appris auprès de mes employeurs », commente-t-il.
Il monte sa première agence immobilière
Trois et demi après avoir poussé pour la première fois la porte d’une agence immobilière, Rémy Durieux a décidé de voler de ses propres ailes. En septembre 2020, il crée son agence : Remy’s Real Estate et ne compte plus ses heures. Un nouveau chapitre qui ne l’effraie pas dans un contexte aussi incertain que nous connaissons tous. « Étrangement, le coronavirus a été très bénéfique. Mon chiffre d’affaires a triplé ces derniers mois. Comme un phénomène de sélection naturelle, cela a permis de faire le tri entre les bons et les mauvais agents. Certains ont eu très peur. Désespérés, ils ont fait plonger les prix des biens en acceptant des offres très basses », reconnaît-il.
Notre entrevue touche à sa fin et inévitablement je lui demande une prédiction sur le marché de l’immobilier. Rémy est prudent et admet sans détour qu’il n’a pas de réponse. « Personne ne peut prédire le futur. En revanche, lorsque l’on observe la courbe immobilière à Brisbane, on note qu’elle est assez régulière. Les prix augmentent doucement mais sûrement. A contrario, Sydney et Melbourne ont connu des variations très importantes. Et les prix peuvent baisser drastiquement. Il faut aussi noter que la dette du pays est considérable. Il se peut qu’il y ait des conséquences défavorables au cours de l’année 2021 ».
(…) la courbe immobilière à Brisbane (…) est assez régulière. Les prix augmentent doucement mais sûrement. A contrario, Sydney et Melbourne ont connu des variations très importantes. Et les prix peuvent baisser drastiquement.
Rémy Durieux
Il me conseille d’investir dans une maison plutôt que dans un appartement. « Le marché est saturé d’appartements à Brisbane. Beaucoup ont perdu de leur valeur depuis dix ans ». Je le questionne sur d’autres conseils pour les acheteurs. Il insiste sur le fait d’être prêt. « Les choses vont très vite. Assurez-vous d’avoir obtenu un accord de prêt, sachez exactement ce que vous souhaitez, définissez clairement vos objectifs. Quand vous trouvez le bien qui correspond le mieux à votre projet, n’hésitez pas ».

Une réussite possible en Australie
Lorsque je l’interroge sur sa réussite, le Français évoque son « énergie, sa niaque, son envie de bien faire ». Mais il affirme avec conviction qu’il n’aurait jamais pu connaître une telle ascension en France. « Cela me rend triste d’ailleurs. Mes amis, ma sœur cadette sont tous diplômés. Ingénieurs, infirmière, ils sont tous plus intelligents que moi, et pourtant leurs salaires ne reflètent pas leur niveau d’études et les heures travaillées. En Australie, lorsque vous êtes déterminé et sérieux, les opportunités sont nombreuses ».
En Australie, lorsque vous êtes déterminé et sérieux, les opportunités sont nombreuses.
Rémy Durieux
La détermination, c’est sans aucun doute ce qui caractérise Rémy Durieux. Je n’ai pas encore de maison à vendre mais je lui confie déjà mes clés. Avant de partir je lui demande quel sera son prochain rendez-vous. J’aurais dû le deviner, sa réponse est évidente : « Je finalise un contrat de vente cet après-midi ». What else?
Découvrez leur parcours d’entrepreneur⸱e :
Arnaud Husser, fondateur de French Beauty Co.
Mai Lo Do Cao, fondatrice de Mai Lo Is In Oz.
Marion Vigot, fondatrice de Mister Rye.